An daou vanac'h hag ar plac'hig yaouank (1)
Les deux moines et la jeune fille (1)
 




I

Bars ar ger euz a Rudon, war ann hent pa her da Rom,
'Zo zavet ur gouant newez, ' zo en-hi menec'h o chom ;

'Zo zavet ur gouant newez ' zo en-hi menec'h iaouank,
Ha noz na de na sessont o tebauch ar merc'hed koant.

Ma oa ur vinorezik a oa meurbet devodes
A ie bemdez da bedi Doue da gouant Sant-Franses.

O tont unan ar menec'h, hag o lavaret d'ez-hi :
- Deut ganin, minorezik, dent ganin-me d'am zi;

Deut ganin, minorezik, deut ganin-me d'am c'hambr,
Me diskoueso d'ec'h 'nn taolinier, ar misteriou ekselant. -

Ebars en kambr ar manac'h na pa 'z eo bet antreet,
Ann orojou war-n-ezhi kerkent a zo alc'houezet :

Hag ar spaz euz a seiz miz, ar spaz euz a seiz miz kloz,
Eo bet ar vinorezik, hep gwelet na de na noz;

Eo bet ar vinorezik, hep gwelet na de na noz,
Met ann daou jakob iaouank, ' ia da ved-hi bep-noz.

Ha war-benn ann eizvet miz, en em gavas dougerez,
Ann daou jakobin iaouank oe neuze meurbet diez.

'Tonet unan ar venec'h, ha d'ez-hi o lavaret :
- 'Tro Doue! minorezik, na penaos a vezo gret ?

'Tro Doue! minorezik, na penaos a vezo gret?
Arru ' zo 'r vikel newez, ma vefomp holl visitet ! -

- 'N han ' Doue! tad Olierr, ma c'hasset da gambr 'r studi,
Na euz vikel na eskop a ielo wit ma c'hlask di. -

O tont unan ar venec'h, hag o lavaret d'ez-hi :
- Selaouet, minorezik, ha zentet a ouzomp-ni ;

Hastet-c'hui, minorezik, da gwiska ho pantouflou,
Wit ma teufet d'ann iliz, da laret ho kousperou ;

Wit ma teufet d'ann iliz, da laret ho kousperou,
Mar n'ho laret euz ann dez, ho larfet euz ar goulou, -

Ma oa ur c'hloarek 'iaouank a oa arnaouet meurbet,
Mont eure da c'houll loja da gouant ar Fransesed.

Tonet unan ar venec'h hag o lavaret d'ez-han :
- En em dennet, ma mignon, na ve lojet den aman. -

Hag hen neuze o tistreï, hag o vonet war he c'hiz,
O vont 'n ur govezion, bars en traonik ann iliz.

War dro ter-heur rok ann dez hen deveuz bet ur spont braz,
'Welet enaoui goulou war gornik ann aoter-vraz.

Hag ar vinorezik paour, pehini doa epouvant,
'C'houlenne a greiz kalon, ann nouenn, ar zakramant ;

'C'houlenne a greiz kalon ann nouenn ar zakramant,
D'ar c'hrouadur a zouge a c'houlenne badeziant.

- Tawet-c'hui, minorezik, tawet ha na welet ket,
Rag n'eo ket c'hui ar c'henta, ann diwesa n' larann-ket :

Aman a zo et nao verc'h, krouadur gant pep-hini,
E-leall sur, Fanchonik tric'houec'h' eo a reont-hi !

Ni ' zo deut hon c'halonou ' vel ann houarn pe ann derv,
Setu aze, Fanchonik, lec'h m'eo et ho kininterv ! -

II

Ar c'hloaregik iaouank gant spont vraz a lavare,
Bars en ti ann hostises, ann de warlerc'h ar heure :

- Digasset d'in, hostises, gwinn-ruz dimeuz ho kwella,
Ma teuïo d'in ma memoar, am euz kollet ann noz-ma ;

Ma teuïo d'in ma memoar, am euz ann noz-ma kollet,
Rag gwelet 'm euz ann noz-ma pez na rafe den a-bed;

Gwelet laza 'r feumeulenn, ar vraoa plac'h a welis,
War ma fe a zen honest, brases a oa d'am avis! -

Ann hostiz a c'houlenne euz ar c'hloarek, p'hen klewe :
- C'hui anavefe 'r re-ze, m'ho gwelfac'h war ar bale? -

- Laket ar c'hleïer da zon, 'r prosession da vont en dro,
Mar marchont war ar pave, sur me ho anaveso..... -

'Nn hini 'zo gant 'r zakramant, ez eo paotr ar c'hontellou, (1)
'Nn hini ' zoug ar sibouar, oa o terc'hel ar goulou !

Kroget en-he, archerienn, ia, en-he raktal kroget,
'R re-ze ho deuz gret ur muntr, ha na raje den a-bed;

Deuz lazet ur feumeulenn, braoa plac'hik a welis ;
War ma le a zen honest, braz a vije ho malis ! -

III

Hi lez-tad a lavare, pa zaouline war hi be :
- Ha posupl ve Fanchonik, a ve te a ve aze ?

Me ' zo bet seiz miz 'r prison, barnet da veza krouget,
Balamour did, Fanchonik, a oa din-me tamalet ! -
I

Dans la ville de Rudon sur la route qui mène à Rome,
On a bâti un couvent neuf, où des moines demeurent;

On a bâti un couvent neuf, où demeurent de jeunes moines,
Qui ne cessent, ni la nuit ni le jour, de débaucher les jolies filles

Il y avait une petite mineure, qui était très-dévote,
Et qui allait tous les jours prier Dieu au couvent de St-François.

Vint un des moines, qui lui dit :
- Venez avec moi, jeune mineure, venez avec moi à la maison;

Venez avec moi, jeune mineure, venez avec moi dans ma chambre,
Je vous montrerai les tableaux, les mystères excellents. -

Quand elle entra dans la chambre du moine,
Les portes furent aussitôt fermées sur elle;

Et pendant l'espace de sept mois, l'espace de sept mois entiers,
Fut la jeune mineure, sans voir ni le jour ni la nuit;

Fut la jeune mineure, sans voir ni le jour ni la nuit,
(Nul autre) que les deux jeunes jacobins qui la visitaient chaque nuit.

Et au bout de huit mois, elle se trouva enceinte,
Et les deux jeunes jacobins furent alors fort inquiets.

Vint un des deux qui lui dit :
- Hélas! jeune mineure, que faire?

Hélas! jeune mineure, que faire,
Il est arrivé un nouveau vicaire général, et nous serons tous visités. -

- De grâce, père Ollivier, conduisez-moi dans la salle d'étude,
Il n'est ni vicaire ni évêque qui vienne me chercher là. -

Vint un des moines, qui lui dit :
- Ecoutez, jeune mineure, et obéissez-nous :

Dépêchez-vous, mineure, de mettre vos pantoufles,
Pour venir à l'église dire vos vêpres;

Pour venir à l'église dire vos vêpres,
Si vous ne pouvez les dire à la lumière du jour, vous les direz à la chandelle. -

Un jeune clerc, harrassé de fatigue,
Vint demander à loger au couvent des Franciscains.

Vint un des moines, qui lui dit :
- Retirez-vous, mon ami, ici on ne loge personne. -

Et lui de s'en retourner alors, de revenir sur ses pas,
Et de se mettre dans un confessionnal, au bas de l'église.

Environ trois heures avant le jour, il eut une grande frayeur,
En voyant allumer de la chandelle sur l'angle du maître-autel.

Et la pauvre mineure, saisie d'épouvante,
Demandait du fond du coeur le sacrement de l'extrême-onction ;

Elle demandait du fond du coeur le sacrement de l'extrême--onction,
Et pour l'enfant qu'elle portait, elle demandait le baptême.

- Taisez-vous, jeune mineure, taisez-vous et ne pleurez pas,
Car vous n'êtes pas la première, la dernière je ne dis pas :

Il y a là neuf filles, créature en chacune d'elles,
En vérité, Françoise, cela fait dix-huit.

Nos coeurs à nous sont devenus comme le fer ou le chêne ;
Voilà, Françoise, l'endroit où repose votre cousine! -

II

Le jeune clerc disait, saisi d'épouvante,
En arrivant, le lendemain matin chez l'hôtesse :

- Apportez-moi, hôtesse, du vin rouge, de votre meilleur,
Pour que je retrouve ma mémoire, que j'ai perdue cette nuit;

Pour que je retrouve ma mémoire que j'ai perdue cette nuit,
Car j'ai vu cette nuit ce que personne au monde ne voudrait faire;

J'ai vu tuer une femme, la plus jolie que jamais je vis,
Et, sur ma foi d'honnête homme, je crois qu'elle était enceinte! -

Et l'hôte demandait au clerc, en l'entendant :
- Reconnaîtriez-vous ces gens-là, si vous les voyiez sur pied? -

- Faites sonner les cloches et sortir la procession,
S'ils marchent sur le pavé, je les reconnaîtrai certainement... -

- Celui qui porte l'ostensoir, est l'homme aux couteaux, (1)
Celui qui porte le ciboire, tenait la chandelle!

Saisissez-les, archers, saisissez-les sur le champ,
Car ceux-là ont commis un meurtre que nul au monde n'aurait commis;

Ils ont tué une femme, la plus jolie que jamais je vis :
Sur ma foi d'honnête homme, grande devait être leur méchan-ceté !

III

Son paratre disait, agenouillé sur sa tombe : -
Est-il possible, Françoise, que tu sois là !

J'ai été sept mois en prison, condamné à être pendu,
A cause de toi, Françoise, que l'on me reprochait ! -



Le sujet


Voir la traduction

Notes de Luzel


(1) Voir la variante ci-dessous :

VARIANTE

'Nn hini ' rok a ansanse, oa ' terc'hel ar goulou;
'Nn hini ' zouge 'r zakramant, oa paotr ar c'hontellou.

- Tostaët, aotro 'r person, tostaët promtamant
Da lemel 'nn aotro Doue a zaou-dorn 'un den mechant !
.........................
Endann seitek dewez ho froses a oe gret,
Barnet gant ar Parlamant da veza dibennet.

Lennet a oe dira-z-he gant rigor ho setanz,
Konduet gant ar bourrew da vont bete 'r potanz;

Konduet a oant gant-han bet' ar vaz huella,
Eno a renkjont merwell bet' ar varn diwesa !

Celui de devant, qui encensait, tenait la chandelle;
Celui qui portait l'ostensoir, était l'homme aux couteaux.

- Approchez, monsieur le recteur, venez vite
Arracher le Seigneur Dieu d'entre les mains du méchant ! -

Sous dix-sept jours, leur procès fut fait,
Ils furent condamnés par le Parlement à être décapités.

On leur lut la sentence rigoureuse,
Et ils furent conduits par le bourreau jusqu'à la potence;

Ils furent conduits par lui jusqu'au dernier degré de l'échelle,
Et là ils durent mourir jusqu'au jugement dernier !


Source

Paroles extraites des "Gwerziou Breiz-Izel", de François-Marie Luzel, publié en 1868
Chanté par Marie-Josèphe Kerival, Keramborgne, 1849

Musique dans "Musiques bretonnes", de Maurice Duhamel. Chanté par Maryvonne Le Flem, de Port-Blanc