Mari ar C'habiten
Marie Le Capitaine
 




I

Selaouet holl, hag a klewfet
Ur werz a zo newez savet ;

Ur werz a zo newez savet,
Da Vari 'r C'habitenn eo gret;

D'hi breur kloarek koulz ha d'ez-hi,
Memeuz maro 'n euz evel-t-hi.

II

Mari 'r C'habitenn a lare
Dimeuz ar ger pa sortie :

- Penherezik, chommet aze,
Me ia da ober ur bale ;

Me ia da ober ur bale,
Arruo er ger bars tri de. -

Mari 'r C'habitenn lavare,
'N ti hi breur kloarek p'arrue :

- Demad ha joa holl en ti-ma,
Ma breur kloarek pelec'h ema? -

Ar vates vihan a laraz
D' Vari 'r C'habitenn, p'hi c'hlewaz :

- Ho preur kloarek er ger n' man ket,
'Baoue 'r beure eo sortiet. -

Mari 'r C'habitenn, p' deuz klewet,
Kerkent d'ar jardinn a zo et;

D'ar jardinn hi a zo bet et,
Ur mab-bihan a deuz ganet ;

Ur mab-bihan a deuz ganet,
En douar a deuz-han plantet.....

III

Ar benheres a hirvoude,
Na gave den hi c'honzolje;

Na gave den hi c'honzolje,
Met hi maerones, hounnes ' ree :

- Tawet, fillores, n' oelet ket,
Ganin-me da Lanwenn 'teufet ;

Ganin-me da Lanwenn 'teufet,
M'ho lakaï en kambr gant m' dimezelled. -

- Tawet, maerones, brao eo laret,
Ken ' ve kestion da welet.

Me ' ia brema d' Lann-Blounevez, (1)
Da c'houd ha 'ma m' mamm en buhez ! -

Kerlies kammed ha ma ree,
Bet ' ann douar hi a zemple.

En Lann-Blounevez p'eo arruet,
'Tall ar potanz eo daoulinet ;

'Tall ar potanz eo daoulinet,
Pardon hi mamm deuz goulennet.

- Aotro Senechal, lest m' mamm en buhe,
Me ielo d'ar maro wit-hi ! -

- Na eo ket arru c'hoaz ann de,
Ma varw ann eil 'wit egile. -

- Me 'm euz tric'houec'h-mill skoed leve,
Kement-all en douar-newe;

Kement-all en douar-newe,
Hag a reï dac'h holl ann ez-he. -

IV

Mari 'r C'habitenn a lare,
'R vaz huella 'r skeul pa bigne :

- Ma breur kloarek n' vo ket krouget,
Rag hennès na eo ket kiriek ! -

- Bet drouk gant ann nep a garo,
Kloarek 'r C'habitenn krouget 'vo! -

Kloarek 'r C'habitenn a lare,
'R vaz-huella 'r skeul pa bigne :

- Mar be bolante ma Doue
'Savfe ur wezenn ' dann tri-de,

Diwar bont ar C'hastel-newez,
Ewit diskleri ar wirionez ! -

V

'R vinorezik pemp bloaz lare,
Euz Lann-Blounevez pa zortie :

- Na euz bugel war ann douar
'N euz kement ha me a c'hlac'har !

Ma mamm ' zo krouget ha dewet,
Ha ma zad paour a zo laourek ! -

'R vironezik pemp bloaz lare
War bont 'r C'hastell-newez p'arrue :

- Tud ar justiz, c'hui ' zo manket,
'Veza ma eontr kloarek krouget !

Me well ur wezenn a zri-dez,
Na war bont ar C'hastell-newez ! -

'R vinorezik pemp bloaz lare
'N toul-dor hi zad pa arrue:

- Digorit ho tor d'inn-me, ma zad,
Wit ma chanjinn dac'h ho rochad ;

Wit ma chanjinn dac'h ho rochet,
Tric'houec'h miz ' zo n'oc'h euz chanjet. -

- Penherezik, it al lec'h-se,
Rag mar chanj 'nn awell a goste,

Mar chanj ann awell a gostez,
C'hui 'laourfe dre doull ann alc'houez !

- Me ' zo 'ama ' tibri gant 'r c'hontron,
Prest int da gregin em c'halon ! -

- Bet ann awell 'n tu ma karo,
Me a garrie beza maro !

Na euz bugel war ann douar
'N euz kement ha me a c'hlac'har !

Ma mamm ' zo krouget ha dewet,
Gant 'nn well hi ludu gwentet ! -

- Pe-seurt torfed a deuz-hi gret,
Mar deuz meritet bout dewet? -

- Da di ma eontr kloarek oa et,
Allas! er ger hen na oa ket;

Ur bugel bihan deuz ganet,
Hag en douar deuz-han plantet. -

- Da betra eo et d'ober-ze ?
Tamal d'in-me hi a halle..... -
I

Ecoutez tous, et vous entendrez
Un gwerz nouvellement composé;

Un gwerz nouvellement composé,
C'est à Marie Le Capitaine qu'il a été fait;

A son frère le clerc comme à elle,
Car il a eu la même mort qu'elle.

II

Marie Le Capitaine disait,
En quittant la maison :

- Chère penherès, restez-là,
Moi, je vais faire une promenade;

Moi, je vais faire une promenade,
Je serai de retour dans trois jours. -

Marie Le Capitaine disait,
En arrivant chez son frère le clerc :

- Bonjour et joie à tous, dans cette maison,
Où est mon frère le clerc ? -

La petite servante répondit
A Marie Le Capitaine, en l'entendant :

- Votre frère le clerc n'est pas à la maison,
Il est sorti depuis ce matin. -

Marie Le Capitaine ayant entendu cela,
Alla aussitôt au jardin;

Elle alla aussitôt au jardin,
Et donna le jour à un petit enfant ;

Elle donna le jour à un petit enfant,
Et le planta dans la terre.....

III

La penherès sanglotait
Et ne trouvait personne pour la consoler;

Et ne trouvait personne pour la consoler,
Si ce n'est sa marraine, celle-là le faisait :

- Consolez-vous, ma filleule, ne pleurez pas,
Vous viendrez avec moi à Lanwenn ; (2)

Vous viendrez avec moi à Lanwenn,
Et je vous mettrai en chambre avec mes demoiselles. -

- Taisez-vous, marraine, il fait beau dire,
Jusqu'à ce qu'il s'agit de voir.

Je vais maintenant à la lande de Plounevez,
Pour savoir si ma mère est encore en vie I -

A chaque pas qu'elle faisait,
Elle s'affaissait à terre.

En arrivant à la lande de Plounevez,
Elle s'est agenouillée au pied de la potence;

Elle s'est agenouillée au pied de la potence
Et a demandé pardon pour sa mère.

- Monsieur le Sénéchal, laissez ma mère en vie,
J'irai à la mort à sa place ! -

- Le jour n'est pas encore venu
Où l'un peut mourir pour l'autre. -

«- J'ai dix-huit mille francs de revenus,
Et autant en terre neuve ;

Autant en terre neuve,
Et je vous donnerai tout cela. -

IV

Marie Le Capitaine disait
En mettant le pied sur le plus haut degré de l'échelle :

- Mon frère le clerc ne sera pas pendu,
Car celui-là n'est pas coupable! -

- Le trouve mauvais qui voudra,
Le clerc Le Capitaine sera pendu! -

Le clerc Le Capitaine disait,
En mettant le pied sur le plus haut degré de l'échelle :

- Si c'était la volonté de Dieu
Qu'un arbre s'élevât au bout de trois jours

Sur le pont de Châteauneuf,
Afin de manifester la vérité ! -

V

La petite mineure de cinq ans disait,
En revenant de la lande de Plounevez :

- Il n'y a pas d'enfant sur la terre
Qui ait autant que moi de chagrin !

Ma mère a été pendue et brûlée,
Et mon pauvre père est lépreux! -

La petite mineure de cinq ans disait,
En arrivant sur le pont de Châteauneuf :

- Gens de la justice, vous avez failli,
En pendant mon oncle le clerc !

Je vois un arbre de trois jours
Sur le pont de Châteauneuf ! -

La petite mineure de cinq ans disait,
En arrivant à la porte de son père :

- Ouvrez-moi votre porte, mon père,
Pour que je vous change votre chemise;

Pour que je vous change votre chemise,
Il y a dix-huit mois que vous n'en avez changé. -

- Chère penherès, retirez-vous de là,
Car si le vent change de côté,

Si le vent change de côté,
Vous attraperez la lèpre par le trou de la serrure !

Je suis ici mangé par les vers,
Bientôt ils m'entameront le coeur ! -

- Que le vent souffle du côté qu'il voudra,
Je voudrais être morte!

Il n'y a pas d'enfant sur la terre
Qui ait autant de chagrin que moi!

Ma mère a été pendue et brûlée,
Et ses cendres ont été jetées au vent !

-- Quel crime a-t-elle donc commis,
Pour avoir mérité d'être brûlée? -

- Elle était allée chez mon oncle le clerc,
Hélas! il n'était pas à la maison ;

Elle donna le jour à un petit enfant,
Et le planta en terre. -

- Et pourquoi a-t-elle fait cela?
Elle pouvait rejeter la faute sur moi..... -



Le sujet


Voir la traduction

(1) En la commune de Plounevez du Faou. Le Châteauneuf ou Kastell-newez dont il est parlé dans cette pièce est aussi Châteauneuf du Faou, dans le Finistère, arrondissement de Châteaulin.

(2) Mot-à-mot la Lande-Blanche, correspondant aux Vurvenn et Gerwenn des pièces précédentes. (voir Franseza Kozik et An Aotrou ar Gerwenn)



Source

Paroles extraites des "Gwerziou Breiz-Izel", de François-Marie Luzel, publié en 1868
Chanté par Marie-Job Kado. Plouaret, 1849

Musique dans "Musiques bretonnes", de Maurice Duhamel. Chanté par Menguy et Léon, de Carhaix