Matelina Troadeg
Mathurine Troadec
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I
Matelina Troadek' lare,
D'hi zad, d'hi mamm, un dez a oe:
- Ma zad, ma mamm, mar am c'haret,
D' bardon sant Iann n'am c'hasfet ket;
Ma speret 'ro da gredi din
Mar 'z ân war ar mor, beuzet vinn
- Bezet drouk gant nep a garo,
Da bardon sant Iann c'hui 'ielo ;
C'hui 'iel' d' bardon sant Iann-ar-Biz,
D' ziskouez he vugel d'ar Markiz. -
- Deuz ama m' bugel, m'as gwiskinn,
Rag bikenn mui n'as diwiskinn!
Ez an d' lakad ma c'horf-balan,
D' lakad d'hen prennan ur ruban;
Ez an d' wiska ma habit-wenn,
Ma davanjer taftaz-melenn,
Ma davanger taftas-melenn,
Birwikenn n'ho diwiskann ken!
Adieu ma friet, holl dut ma zi,
Rag birwikenn n'ho kwelann mui ! -
II
Matelina Troadek 'lare,
Pa lake hi zroad el lestr-newe:
- Adieu d'ac'h-c'hui, holl dut ma bro,
Me ia da antrenn em anko. -
Matelina Troadek 'lare,
Pa droë 'r vag war hi c'hoste:
- Laret holl ho chapeledou,
Me 'lavaro ma gousperou;
Me lavaro ma gousperou,
'Z ia 'r vag da dreï war hi geno!
Me a well el liorz ma mamm,
O troc'ha kaol da ober koan ;
Mar selaou Doue ma fedenn,
Birwikenn na droc'hfe kaolenn;
Birwikenn kaolenn na droc'hfe,
P'e kiriek din d' goll ma buhe!
Aotro sant Matelinn Monkontour,
C'hui 'zo mestr ann awèll hag ann dour;
Aotro sant Matelin Monkontour,
Dalc'het ma bugel war ann dour;
Prezervet d'am bugel he vuhe,
Kasset-han d'ar bordik duze! -
III
Kriz 'vije 'r galon na oelje,
En aod sant Iann nep a vije,
'Welet ur bugel tric'houec'h miz
War 'r planken-n 'n aod sant Iann-ar-Biz;
Dindan-han ur zaë satinn-griz,
Da ziskouez oa mab ur markiz.....
IV
Matelina Troadek 'zo kavet
En fonz ar mor, tric'houec'h gourred,
En hi dorn ur boud bizinn-glaz,
Rekour hi buhe felle d'ei c'hoaz!......
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I
Mathurine Troadec disait
A son père et à sa mère, un jour :
- Mon père, et ma mère, si vous m'aimez,
Vous ne m'enverrez pas au pardon de Saint-Jean;
Mon esprit me donne à croire
Que si je vais sur la mer, je serai noyée. -
- Le trouve mauvais qui voudra,
Vous irez au pardon de Saint-Jean ;
Vous irez au pardon de Saint-Jean du Doigt,
Pour faire voir son fils au marquis. -
- Viens, mon enfant, que je t'habille,
Car jamais plus je ne te déshabillerai !
Je vais mettre mon corset,
Et le lacer avec un ruban;
Je vais mettre ma robe blanche,
Et mon tablier de taffetas jaune;
Mon tablier de taffetas jaune,
Jamais plus je ne l'oterai !
Adieu, mon mari, et tous les gens de la maison,
Car jamais plus je ne vous reverrai ! -
II
Mathurine Troadec disait
En mettant le pied sur l'embarcation neuve :
- Adieu à vous tous, gens de mon pays,
Je vais entrer dans ma mort ! -
Mathurine Troadec disait,
Quand l'embarcation penchait sur le côté :
- Récitez tous vos chapelets,
Et moi, je vais réciter les vêpres;
Moi je vais réciter les vêpres,
Car l'embarcation va chavirer !
Je vois ma mère dans son jardin,
Qui coupe des choux pour son souper;
Si Dieu exauce ma prière,
Jamais plus elle ne coupera de choux
Jamais plus elle ne coupera de choux.
Car c'est elle la cause que je perds la vie!
Monsieur saint Mathurin de Moncontour,
Vous êtes le maître du vent et de l'eau ;
Monsieur saint Mathurin de Moncontour,
Tenez mon enfant au-dessus de l'eau;
Sauvez la vie à mon enfant,
Et conduisez le au rivage ! -
III
Dur eût été le coeur de celui qui n'eût pleuré
Sur le rivage de Saint-Jean,
En voyant un enfant de dix-huit mois
Sur une planche dans la grève de Saint-Jean du Doigt;
Il portait une robe de satin blanc,
Pour montrer qu'il était le fils d'un marquis (1).....
IV
Mathurine Troadec a été retrouvée
A dix-huit brasses, au fond de la mer;
Elle tenait à la main une branche de varech vert;
Elle voulait encore sauver sa vie !....
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Le sujet
Voir la traduction
(1) S'agirait-il ici du fameux marquis de Lomaria, dont le château de Guérande n'est pas bien loin de Saint-Jean du Doigt, et qui est le sujet d'un grand nombre de chants et de traditions populaires dans le pays ?
Je crois qu'il n'y a aucune corrélation entre cette pièce et la précédente.
Saint-Mathurin de Moncontour est encore un des lieux de pélerinage les plus fréquentés de la Bretagne.
Source
Musique dans "Musiques bretonnes", de Maurice Duhamel
Paroles extraites des "Gwerziou Breiz-Izel", de François-Marie Luzel, publié en 1868
Luzel a recueilli les paroles de cette version auprès d'une fileuse du bourg de Guérande, en mai 1863.
Air recueilli par Duhamel auprès de Maryvonne le Flem, de Port-Blanc
Duhamel donne un autre air, recueilli auprès de Maryvonne Nicol de Plouguiel, mais les paroles ne correspondent pas à celles de Luzel (les vers ont 7 et 6 pieds, au lieu de 8)
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