Yannig Kokard (2)
Yannik Coquard (1)
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I
Iannik Kokard a Blouilliau,
Braoa païsan ' zo er vro ;
Bez' eo roue 'r baïsanted,
Kalonik ann demezelled.
Iannik Kokard a lavare
D'he dad, d'he vamm, un dez a oe :
- Konje ' choulennann da dimi,
Da dimi da Vari Tili ;
Da dimi da Vari Tili,
Madou a-walc'h ' roër gant-hi :
Reï reur gant-hi peder buc'h leaz,
Komansamant mad a diegez;
Ann dibab a der gomanant,
Ha leiz ar boezel a arc'hant;
Reï a reur ur c'harr hag ann denn,
Ha leiz un donel a neud-gwenn. -
He dad, he vamm a lavare
D'ho mab Iannik eno neuze :
- Salv-ho-kraz, ma mab, na po ket
Na hi na merc'h kakouz a-bed. -
II
Mari Tili a lavare,
'N ti ar C'hrokard koz p'arrue :
- Roït d'in skabel d'azeza,
Mar ben-me merc'h-kaer en ti-ma. -
- Merc'h-kaer en ti-ma n' vefet ket,
Na c'hui na merc'h kakouz a-bed. -
- Biskoaz n'ho po gwaz-kalounad,
Wit laret kakouz euz ma zad ! -
III
Iannik Kokart a lavare
D'he dad, d'he vamm, un dez a oe :
- Ho konje, ma mamm ha ma zad,
Da vont d'ar pardon d'ar Folgoat. -
- Ia, ma mab, it-c'hui d'ar Folgoat,
Hag it en kompagnunes-vad..... -
Pa oa gant ann hent o vonet,
Mari Tili 'n euz rankontret :
- Iannik Kokard, d'in-me laret,
Pelec'h ez et pe ez oc'h bet ? -
- Me ia d'ar pardon d'ar Folgoat,
Doue da reï d'in pardon mad ;
Doue da reï d'in pardon mad,
D'am zud er ger kezelo-mad ! -
- Mari Tili a lavare,
Bars en Plouvorn pa arrue :
- Diskennit d'in gwinn da evan,
Diskennit euz ho kwinn gwellan ;
Ha diskennit d'in gwinn-kleret,
'R gwinn blij da galon ar merc'hed ! -
'N ur memeuz gwerenn ez evjont,
'N ur memeuz gwele e kouskjont.....
IV
P' ee Iannik Kokard da vouit dour,
Na ouie ket ez oa klanvour,
Ken a deuaz da em zellet,
E tispenne gant ar c'hlenved !
Iannik Kokard a lavare
Er ger, d'he vamm, pa arrue :
- Dalet, ma mamm, ho tour kerc'het,
En han' Doue, n'evet-han ket.
Ha mar fellfe d'in-me laret,
Me oar pelec'h 'on bet gwallet :
Oc'h eva gwinn, 'r memeuz gwerenn
Gant ur plac'hik koant a garienn ;
Oc'h eva gwinn 'r memeuz gwerenn,
Hag ur plac'h a oa kakousenn !
Ha ma karrfe ma mamm ma zad
Reï d'in kant skoed hag ur marc'h mad,
Me iafe da rivier Jourdenn,
Lec'h ma ve gwellat al laourienn ;
Lec'h m'oa hon Zalwer badezet,
'Zo remed euz a bep-klenved :
Mar karet, ma mamm ha ma zad,
Reï d'in kant skoed hag ur marc'h mad,
Me ' iafe da rivier Jourdenn,
Lec'h ma ve gwellat al laourienn ? -
- Da rivier Jourdenn n'iefet ket,
Da lann 'r C'hlandi c'hui 'vo kasset ;
C'hui 'vo kasset da lann ar c'hlan,
War vord ann hent ' ia da Zant-Iann. -
- Mar ' zavet un ti newez d'in,
Hen zavet en lann ar C'hlandi,
Ma welinn ar belerined
O vont en miz maë d'ar Ieodet.
Lakit ur prennestr 'n he bignon,
'Wit ma welinn 'r prosession;
Wit ma welinn 'r prosession
En Plouilliau, dez ar pardon;
M' welinn baniel-braz Plouilliau,
(Me 'm euz-han douget a weziou ! )
Lakit ur prennestr 'n hi gostez,
Wit ma welinn ar Gernewez;
Wit ma welinn ar Gernewez,
Eno ema ma c'harantez. -
V
Mari Tili a lavare
Er ger d'hi zad, pa arrue :
- Tric'houec'h paotr iaouank 'm euz laouret,
Iannik Kokard ann naontekvet;
Iannik Kokard, ann diveza,
Laka ma c'halon da ranna !
Gant ul lomm goad ma biz-bihan,
Me laourfe kant evel unan ! -
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I
Iannik Coquart, de Ploumilliau,
Est le plus beau paysan du pays;
Il est le roi des paysans
Et le petit coeur des demoiselles.
Iannik Coquart disait
Un jour, a son père et à sa mère :
- Je vous demande votre congé pour me marier,
Pour me marier avec Marie Tili ;
Pour me marier avec Marie Tili,
On lui donne une dot considérable:
On donne avec elle quatre vaches a lait,
Bon commencement de ménage;
Avec une au choix de trois fermes
Et plein un boisseau d'argent;
On donne une charrette avec son attelage,
Et plein un tonneau de fil blanc. -
Son père et sa mère disaient
A leur fils Iannik, en ce moment :
- Sauf votre grâce, mon fils, vous ne l'aurez pas,
Ni elle ni aucune autre fille de lépreux. -
II
Marie Tili disait,
En arrivant chez le vieux Coquart :
- Donnez-moi escabeau pour m'asseoir,
Si je dois être belle-fille dans cette maison. -
- Belle-fille dans cette maison vous ne serez,
Ni vous, ni aucune autre fille de lépreux. -
- Jamais vous n'éprouverez de plus grande douleur
Que pour avoir appelé mon père lépreux! -
III
Iannik Coquart disait
Un jour, à son père et à sa mère :
- Votre congé, ma mère et mon père,
Pour aller au pardon du Folgoat. -
- Allez, mon fils, allez au Folgoat,
Et allez-y en bonne compagnie.....
- Comme il était en route, pour s'y rendre,
Il rencontra Marie Tili :
- Iannik Coquart, dites-moi,
Où allez-vous, où avez-vous été ? -
- Je vais au pardon du Folgoat,
Que Dieu me donne bon pardon ;
Que Dieu me donne bon pardon,
Et à mes parents, à la maison, bonne nouvelle !
- Marie Tili disait,
En arrivant à Plouvorn :
- Versez-moi du vin à boire,
Versez-moi de votre meilleur vin :
Versez-moi du vin clairet,
Le vin qui plaît au coeur des femmes ! -
Ils burent dans le même verre
Et couchèrent dans le même lit.....
IV
Quand Iannik Coquart allait prendre de l'eau,
Il ne savait pas qu'il était malade,
Jusqu'à ce qu'il vint à regarder dans l'eau,
Et qu'il vit qu'il se dépeçait par la maladie !
Iannik Coquart disait
A sa mère, en arrivant à la maison :
- Voici, ma mère, l'eau que j'ai été vous prendre,
Mais, au nom de Dieu, n'en buvez pas.
- Si je voulais le dire,
Je sais où j'ai été empoisonné :
C'est en buvant du vin dans le même verre
Qu'une jeune fille que j'aimais;
En buvant du vin dans le verre
D'une fille qui était lépreuse!
Et si voulaient mon père et ma mère
Me donner cent écus et un bon cheval,
J'irais à la rivière du Jourdain,
Où les lépreux recouvrent la santé;
Là où notre Sauveur fut baptisé,
Il y a remède contre toutes les maladies.
Si vous vouliez, ma mère et mon père,
Me donner cent écus et un bon cheval,
J'irais à la rivière du Jourdain,
Où les lépreux recouvrent la santé? -
- Vous n'irez pas à la rivière du Jourdain,
Mais vous serez conduit au Klandi;
Vous serez conduit à la lande du malade,
Sur le bord du chemin qui mène à Saint-Jean. -
- Si vous me faites bâtir une maison neuve,
Faites-la bâtir sur la lande du Klandi,
Pour que je puisse voir les pèlerins
Qui si rendent au mois de mai au Guéodet.
Et qu'il y ait une fenêtre dans le pignon,
Pour que je puisse voir la procession;
Pour que je puisse voir la procession
A Ploumilliau, le jour du pardon.
Pour que je voie la grande bannière de Ploumilliau,
(Je l'ai portée plus d'une fois!)
Mettez aussi une fenêtre sur le côté,
Pour que je puisse voir la Villeneuve;
Pour que je puisse voir la Villeneuve,
Car c'est là qu'est mon amour ! -
V
Marie Tili disait
A son père, en arrivant à la maison :
- J'ai donné la lèpre à dix-huit jeunes gens,
Et Iannik Coquart est le dix-neuvième;
Iannik Coquart, le dernier,
M'a brisé le coeur !
Avec une goutté de sang de mon petit doigt,
Je donnerais la lèpre à cent, comme à un seul! -
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Le sujet
Voir la traduction
Notes de Luzel
VARIANTES.
Une autre version, que je dois à Marie-Yvonne Le Roy, la servante
de l'ancien curé de Plouaret, M. Denès, commence ainsi :
Iannik Kokard a lavare
D'he dad, d'he vamm, un dez a oe :
- Ma zad, ma mamm, mar am c'haret,
D'ar marc'hajou n'am c'hasfet ket,
Balamour da Vari Tili,
Na dremenann gwes ' biou hi zi,
Na dremenann gwes ' biou hi zi
N'am be komplimant digant-hi :
'Ve war ann daol un doubier wenn,
Ur beseled amann melenn,
Hag un dorz a vara michenn,
Hag en hi daou-dorn diou werenn ;
Gant-hi 'n hi daou-dorn diou werenn,
Unau gwinn-ruz, un' all gwinn gwenn.....
Mari Tili a lavare,
'N ti lann Kokard pa 'z arrue :
- Demad ha joa holl en ti-ma,
Roët d'in skabel d'azeza ;
Roët d'in skabel d'azeza,
Mar veen ar verc'h-kaer en ti-ma. -
Ar C'hokard koz a lavaras,
Da Vari Tili, p'hi c'hlewas :
- Merc'h-kaer en ti-ma n' vefet ket,
Na c'hui na merc'h kakouz a-bed. -
- Biskoas n'oc'h euz bet kalounad,
'Vel ' laret kakouz euz ma zad!..... -
Biskoas na welis braoc'h ti
'Wit na ' ve ur gakouziri ;
Eno ' ve porz-bihan, porz-braz
'Vel 'n ti ann aotro a Roc'hlaz ;
Eno zo porz-braz, porz-bihan,
'Vel 'n ti ann aotro Koat-Ronan.....
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Iannik Coquart disait,
Un jour, à son père et à sa mère :
- Mon père, ma mère, si vous m'aimez,
Vous ne m'enverrez pas aux marchés,
A cause de Marie Tili;
Je ne passe jamais devant sa maison,
Je ne passe jamais devant sa maison
Sans obtenir d'elle un compliment :
Sur la table il y a une nappe blanche,
Un vase rempli de beurre jaune,
Et une tourte de pain de miche (pain blanc),
Et elle tient à la main deux verres;
Elle tient à la main deux verres,
L'un de vin rouge, l'autre de vin blanc..... -
Marie Tili disait,
En arrivant chez Jean Coquart :
- Bonjour et joie à tous dans cette maison,
Donnez-moi un escabeau pour m'asseoir;
Donnez-moi un escabeau pour m'asseoir,
Si je dois être belle-fille dans cette maison. -
Le vieux Coquart répondit
A Marie Tili, quand il l'entendit :
- Belle-fille dans cette maison vous ne serez,
Ni vous, ni aucune fille de lépreux! -
- Jamais vous n'aurez eu de crève-coeur,
Comme pour avoir appelé mon père lépreux ! -
Jamais je ne vis de plus belle maison,
Qu'une léproserie;
Il y a là petite cour et grande cour,
Comme chez le seigneur de Roc'hlaz;
Il y a là grande cour et petite cour,
Comme chez le seigneur de Coat-Ronan.....
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Cette version se termine ainsi :
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Kriz ' vije 'r galon na oelje
En Plouilliau nep a vije,
O welet ar groaz, ar banier
Hag ar veleïnn hag ar c'hloer,
O kass Iannik d'he di newez !.. ..
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Dur eût été le coeur de celui qui n'eût pleuré,
Etant à Ploumilliau,
En voyant la croix et la bannière,
Et les prêtres et les clercs,
Conduisant Iannik à sa maison neuve!.....
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NOTE
Je connais parfaitement toutes les localités désignées dans ce gwerz.
Ar C'hlandi (mot-à-mot maison du malade) est un village à peu de
distance du bourg de Ploumilliau ; la chapelle de Saint-Cado en est
voisine, et le village de Saint-Jean-Brézehan est un peu plus loin, sur
la route de Saint-Michel-en-Grève. Roc'hlaz, dans cette même commune,
était un château dont il ne reste plus aujourd'hui que quelques ruines
sans importance. Coat-Ronan était aussi un manoir noble d'une commune
avoisinante. La Villeneuve (ar Gernewez) est à cinq cents mètres,
environ, du bourg de Ploumilliau, sur le bord de la route de
Saint-Michel-en-Grève. Quant au bourg de Plouvorn, dans le Finistère,
il est bien sur la route que devaient suivre les pèlerins des
Côtes-du-Nord, pour se rendre au Folgoat.
Source
Paroles extraites des "Gwerziou Breiz-Izel", de François-Marie Luzel, publié en 1868
Chanté par Marie Clech, sabotière de la forêt de Beffou. - 1863.
Dans "Musiques bretonnes", Maurice Duhamel ne donne pas d'air pour cette gwerze
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